Premier film français présenté en Compétition, la Croisette s’est déjà choisi un favori au deuxième jour de la Compétition.
Cannes 2019 (compétition). C’est une bombe qui est tombé sur Cannes en ce début de Festival. Ladj Ly, figure de proue de la mouvance Kourtrajmé soutenu par Vincent Cassel, Kim Chapiron, Mathieu Kassovitz, Mouloud Achour et consorts, y est venu présenté son premier film coup de poing, seul derrière la caméra, le bien-nommé brûlot Les Misérables.
Stéphane, tout juste arrivé de Cherbourg, intègre la Brigade Anti-Criminalité (BAC) de Montfermeil en Seine-Saint-Denis. Il va faire la rencontre de ses nouveaux coéquipiers, Chris et Gwada, deux « Bacqueux » d’expérience. Il découvre rapidement les tensions entre les différents groupes du quartier. Alors qu’ils se trouvent débordés lors d’une interpellation, un drône filme leurs moindres faits et gestes..
Là où Matthieu Kassovitz intellectualisait la forme et le fond dans La Haine il y a près de 25 ans. « Jusqu’ici tout va bien, ce qui compte ce n’est pas la chute, c’est l’atterrissage » assénait Hubert Koundé, Ladj Ly, lui, impulse une énergie beaucoup plus naturelle et profonde. La référence à Victor Hugo n’est pas feinte. Le réalisateur veut ancrer ses congénères dans la France d’aujourd’hui, en lutte pour (sur)vivre tout simplement. Son envie de prendre la caméra et de rendre compte au près de la réalité des rapports dans ces « territoires perdus de la République »est née lors des émeutes de banlieues en 2005.
Tiré d’un court métrage éponyme à succès, nommé aux César 2018 et primé à Clermond-Ferrand, Ladj Ly y décline une relecture élargie et on pense beaucoup à Jacques Audiard dans l’intensité drama qui monte crescendo et un dernier quart du film absolument suffocant.
Dans « Les Misérables », la caméra est partout. Et surtout avec Alexis Manenti, Djebril Zonga et leur nouveau coéquipier (Damien Bonnard). Ladj Ly les filme caméra embarquée, « embedded » comme on dirait en territoire de guerre, et ne les lâche pas d’une semelle entre ces barres d’immeubles comme un western des temps modernes avec sa chorégraphie, ses faux semblants, son architecture, ses rues, ses passeurs, ses shérifs, ses dealers, ses mères, ses grands frères, ses prédicateurs…