La présentation du nouveau film de Jonathan Glazer est le premier choc du Festival 2023
THE ZONE OF INTEREST
Jonathan Glazer (grande-bretagne) Compétition
10 ans après le saisissant Under The Skin, film-somme qui rétrospectivement reste parmi les œuvres les plus marquantes de la décennie 2010, le Britannique Jonathan Glazer présentait enfin The Zone of Interest, projet maintes fois annoncé puis reporté. L’attente en valait la peine c’est le moins que l’on puisse dire. Le commandant du camp d’Auschwitz, Rudolf Höss, et sa femme Hedwig s’efforcent de construire une vie de rêve pour leur famille dans une maison avec jardin à côté du camp. Porté à l’écran par Christian Friedel (fabuleux) et Sandra Hüller (figure marquante de Cannes, révélée dans Toni Erdmann, et doublement sélectionnée cette année on la retrouvera aussi dans Anatomie d’une chute de Justine Triet), le maléfique couple Höss est terrifiant à vivre sa vie dans leur maison cossue mitoyenne de l’horreur. On se souvient du choc qu’avait pu être Le Fils de Saul de Lazlo Nemes en son temps, s’attaquant à sa manière à l’impossible représentation de la Solution Finale. Glazer, à un autre endroit, réussit la même prouesse. Ce n’est pas étonnant non plus d’avoir choisi cette seule image illustrative celle d’une famille paisible dans un univers bucolique, la première image du film qui apparaît à l’écran. La première image certe mais qui arrive au bout de plusieurs minutes plongées dans le noir que nous sommes comme une préparation sonore et mentale à ce que l’on va voir et ce que l’on ne va pas voir. Comme un voyage préparatoire que ferait le spectateur avant de rencontrer cette famille et ce lieu de l’horreur absolue. S’en suit la chronique ordinaire d’une famille bourgeoise allemande des années 1940. Sans que nos oreilles n’aient le moindre répit à subir un bourdonnement incessant et glaçant de la machine à exterminer toute proche. Tiré du roman éponyme de l’Anglais Martin Amis, Jonathan Glazer apporte son premier choc à une compétition cannoise qui démarre fortissimo. La Croisette se déchire déjà entre les soupe-au-lait qui veulent y voient (pardon veulent y voir) tous les poncifs de la caricature du film poseur de festivals, et les autres en état de choc qui ne peuvent pas s’arrêter de parler et de parler du film depuis la projection. On a choisi son camp.
cannes 2023 // compétition // bac films // prochainement en salle