Avec les beaux jours, la belle saison des « 100 films pour Cannes » reprend à quelques encablures de la conférence de presse !
Qui pour succéder à Ruben Östlund, glorieux double-palmé de rang ? Une fois n’est pas coutume, le Suédois pourra lui-même « présider » aux destinées de la récompense cinéma la plus convoitée du monde, lui qui a été désigné à la tête du jury 2023.
Il restera un sacré paquet d’interrogations à lever avant d’en arriver là et ce, même si Thierry Frémaux a livré quelques indiscrétions lors du traditionnel Q&A d’avant conférence de presse accordé à Variety. On (re)fait le point ?
1 • Pas de Pedro Almodovar en ouverture avec son western queer en format court Strange Way of Life avec Pedro Pascal et Ethan Hawke. Le comité cannois trouvera bien une place quelque part à Lumière ou Debussy pendant le Festival pour s’octroyer la primeur du film. Dans les coursives, depuis ce démenti officiel pour l’ouverture, la côte Betclic d’y voir Johnny Depp et Maïwenn lancer les hostilités avec Jeanne du Barry est remontée en flèche.
2 • Toujours pas de films de plateformes en compétition qui ne bénéficieraient pas d’une première fenêtre dans les salles françaises.
3 • La volonté affichée de revenir à un nombre standard de films en sélection après deux années post-covid exsangues (tout le métier s’en félicitera si et seulement si son film reçoit bien une invitation officielle).
4 • Malgré le point 3 la section Cannes Première en salle Debussy est sanctuarisée (limité d’après nos informations à 4 ou 5 films). Dopée par les succès d’estime et public des fleurons de l’an passé (La Nuit du 12 et As Bestas) les sollicitations des grands distributeurs s’amoncèlent sur le bureau de Christian Jeune afin d’y glisser leurs champions en vue d’un lancement en salle réussi dès l’été.
5 • Enfin côté « bannis », le film de Roman Polanski ne devrait pas être prêt pour une première mondiale en mai tandis que Coup de chance le dernier Woody Allen tourné en France (avec Valérie Lemercier, Lou de Laâge et Niels Schneider) « est en finition je crois, on se positionnera en temps et en heure » conclut un délégué général qui retombe décidément toujours sur ses pattes.
Scorsese confirmé en attendant Indiana Jones
Côté parallèles, alors que la Semaine de la Critique a réussi sa mue l’an passé avec Ava Cahen dans la continuité d’une sélection plus que jamais resserrée et auréolée de son totem d’immunité Aftersun, tous les regards seront portés du côté de la Quinzaine – désormais – des Cinéastes emmenée par Julien Rejl qui promet avec son comité éclectique, renouvelé et enlevé un choix de films et propositions « libres et impertinents ». Ça promet ! Wask suivra cette évolution de très près. On y reviendra bientôt.
Pour parler des studios américains, pourvoyeurs en chef de tapis rouges 25 étoiles, tous les signaux indiquent bien que Disney lancera son Indiana Jones (volet 5) à Cannes dans un des prestigieux slot hors compétition. Une date de début de festival est même déjà en travail autour du 17 ou du 18 mai.
De son côté, Paramount, fort de la réussite Top Gun et son lot de paillettes et de patrouille de France en 2022, vient de finir de convaincre Apple d’arrimer au vieux-port le Scorsese nouveau, Flowers of The Killer Moon, avec la perspective d’une montée des marches de week-end mémorable le 20 mai à côté du maître Martin : Leonardo DiCaprio, Robert De Niro, Lily Gladstone et Jesse Plimmons ! Reste une incertitude et non des moindres, ce premier film officiellement annoncé en sélection officielle 2023 concourra-t-il à la Palme d’or ? Rien n’est moins sûr.
Warner n’enverra ni Barbie ni la suite Dune à Cannes
Ç’aurait pu être une bien belle dot de la mariée. L’arrivée de l’ex-boss Warner Iris Knobloch à la présidence du festival n’aura pas permis de séduire les têtes de gondole du studio américain. Ni Barbie de Greta Gerwig, ni Dune : partie 2 de Denis Villeneuve ne passera une tête entre le Carlton fraîchement réouvert et le palais. Même sort chez Universal pour le nouveau Christopher Nolan, Oppenheimer, biopic sur le père de la bombe atomique interprété par Cillian Murphy.
D’autres projets qui bruissaient vers Cannes depuis Berlin semblent aussi prendre un chemin loin du sud de la France. Citons les deux prochains films de Luc Besson (June + John et Dogman) après un invraisemblable buzz à l’EFM allemand, et puis quatre portraits du XXème siècle : l’intrigant Bernadette avec Catherine Deneuve en Madame Chirac devant la caméra de Léa Domenach, Lee de Ellen Kuras avec Kate Winslet dans la peau de la photographe Elisabeth Lee, Priscilla de Sofia Coppola, ou encore El Conde le projet sur Pinochet de Pablo Larrain chez Netflix.
Peu de chance non plus d’y voir au mois de mai MMXX de Cristi Puiu, ni Sauvagerie de Miguel Gomes, contrarié pour l’un en post-production et pour l’autre resté toujours au point mort depuis la période Covid sur toute la partie brésilienne du tournage. Pas plus que le Roumain Radu Jude qui ne semble pas prévoir de voyage méridional avec son Do Not Expect Too Much From The End of The World.
On passera aussi sur les arlésiennes Abdel Kechiche (Mektoub My Love : Canto Due 🎶 Tre, Quattro, Maria... 🎶), Terrence Malick (The Way of the Wind) auxquels il serait judicieux d’y ajouter les interminables (et tout aussi frénétiquement attendus) Eureka de Lisandro Alonso et The Zone of Interest de Jonathan Glazer (Under The Skin).
Reste le cas particulier de la Chine avec quelques auteurs majeurs attendus et/ou annoncés au premiers rang desquels Jia Zhangke, Wang Xiaoshuai et Lou Ye. Aucun de ces noms-là ne feront partie de la liste Wask 2023, non sans espoir pour le festival mais faute d’infos suffisantes. La faute en partie à la censure chinoise qui poussent certaines productions d’envergure à rester sous les radars et avancer masquées. Si l’on retrouve en mai un nouveau long métrage de fiction de Jia Zhangke (The World, A Touch of Sin) en compétition, on ne se plaindra pas de la manigance ! Ce qu’il n’empêchera pas de glisser (en bonnes places) d’autres films chinois déjà soumis aux comités.
Les « 100 films pour Cannes » dès le 3 avril
Dernier rappel en forme de conclusion d’un prologue un peu long. On me demande souvent d’où vient donc cette idée de liste des 100 films pour Cannes™ ? Celle d’une obsession cannoise qui amènera à vouloir capturer un aperçu le plus exhaustif possible de la production art & essai mondial. S’en suivra de développer ses propres outils d’analyse et activer ses antennes dans tous les corps de métier de l’industrie cinéma internationale.
Et surtout, surtout, surtout, cette folle envie de participer à l’excitation collective, un calendrier de l’avent sans chocolat. Parce que Cannes reste le lieu de l’émotion collective, des passions partagées. « Rien de mieux pour transmettre à tout le monde, partout, l’amour du cinéma. » comme le disait merveilleusement Régine Vial du Losange pendant le confinement 2020.
À en croire le trépignement de beaucoup d’entre vous ces dernières semaines, l’exercice plaît toujours autant et la cuvée 2023 attendue.
Allez quelques biscuits juste avant le week-end sur les 100 films pour Cannes 2023 : 1/4 de premiers films (un record), une belle vitalité des premiers et deuxièmes longs métrages espagnols, 40 nationalités représentées et presque autant de réalisatrices, des territoires nouveaux ou dont on n’a que très peu de nouvelles (Mongolie, Bhoutan, Malaisie), 5 films déjà présents en 2022 seront de retour… À lundi pour la première fournée.
Les 100 films pour Cannes 2023, comment ça marche ?
Du 3 au 7 avril, retrouvez sur wask un nouvel épisode chaque jour avec 20 films dévoilés quotidiennement du numéro 100 au numéro 1.
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Thomas Gastaldi
(mars 2023)